Tout donner pour les autres… au point de s’oublier ?

"Je donne tellement !"

Cette phrase, combien de fois l’ai-je entendue en consultation ? Elle s’échappe souvent dans un soupir, accompagnée de larmes aux yeux. Ces trois petits mots, lourds de frustration et de douleur, reflètent un mal silencieux qui touche tant de mères.

Ces femmes, généreuses et dévouées, sont prises dans un tourbillon d’obligations. Elles jonglent avec des responsabilités multiples : la vie de famille, la carrière, la maison, la gestion des imprévus. Mais ce don incessant finit par les épuiser, parfois jusqu’à l’effondrement.

En tant que thérapeute – et moi-même maman – je suis profondément touchée par ces femmes qui, par amour et sens du devoir, se placent toujours en dernier. J’en ai fait partie, et c’est encore parfois le cas aujourd’hui. Mais comment en arrive-t-on là ? Et surtout, comment reprendre le contrôle avant qu’il ne soit trop tard ?

Les signes d’un épuisement invisible

Tout commence par une fatigue, mais pas n’importe laquelle. Ce n’est pas simplement celle qui vous envahit après une longue journée ou une semaine chargée. Non, il s’agit d’une fatigue chronique, tenace, qui ne disparaît pas même après un ou plusieurs bonnes nuits de sommeil.

Cette fatigue dépasse largement le cadre physique. Elle envahit aussi l’esprit et le cœur. Peu à peu, des signaux d’alarme s’accumulent :

  • Troubles du sommeil : insomnies, réveils nocturnes, difficulté à s’endormir malgré l’épuisement.

  • Problèmes de concentration : incapacité à suivre une conversation ou à terminer une tâche sans être distraite.

  • Sensibilité accrue : un mot maladroit ou une remarque peut soudainement provoquer des larmes ou de la colère.

  • Troubles de la mémoire : oublier un rendez-vous ou se tromper dans les dates devient de plus en plus fréquent.

  • Les pensées envahissantes, ces scénarios catastrophes qui tournent en boucle dans votre esprit, à base de « Et si » et de « Et pourquoi ? »:

    • « Et s’il arrivait quelque chose à mon enfant ? »

    • « Et pourquoi je n’y ai pas pensé plus tôt ? »

Ces signes ne sont pas à prendre à la légère, car ils témoignent d’un épuisement qui mérite d’être reconnu et pris en charge avant qu’il n’affecte encore davantage votre bien-être.

Une mère épuisée d'avoir tout donné pour ses enfant

Pourquoi est-il si difficile de solliciter un soutien ?

Le don de soi est valorisé dans notre société, particulièrement chez les mères. On imagine d’elles qu’elles sont par nature multitâches, qu’elles anticipent tout, qu’elles font preuve d’une disponibilité infinie. Cette pression, à la fois sociale et intériorisée, pousse à repousser ses limites, souvent au détriment de sa propre santé, à laquelle on n’a même plus le temps de penser.

À cela s’ajoute un poids immense : la culpabilité. Elle s’installe insidieusement et murmure :

  • « Si je ne fais pas tout, qui le fera ? »

  • « Si je prends du temps pour moi, je suis une mauvaise mère. »

  • « Que vont penser les autres de moi ? »

Résultat ? Beaucoup souffrent en silence, persuadées que demander de l’aide est un aveu de faiblesse. Et pour ne rien arranger, les autres mères semblent s’en sortir parfaitement. C’est donc forcément nous qui avons un problème, non ? Mais en réalité, elles cachent souvent leurs propres difficultés, tout comme nous.

Ce déni du besoin de soutien nous isole davantage et nous prive des ressources nécessaires pour tenir le coup.

Le piège de la normalisation

Le plus insidieux dans ce processus, c’est qu’on finit par croire que cette situation est banale. Être débordée, stressée et épuisée devient une norme. Dans certaines conversations, c’est même un sujet de « fierté » : « Je n’ai pas pris une minute pour moi depuis des mois ! »

Mais cette glorification de l’épuisement est dangereuse. Elle masque un problème profond : celui d’une société qui valorise la productivité au détriment de la santé. Tant qu’on considère cet épuisement comme « normal », il est difficile de s’autoriser à agir pour changer les choses.

Reprendre le contrôle : par où commencer ?

Si vous vous reconnaissez dans ces lignes, sachez que vous n’êtes pas seule. Des milliers de femmes traversent les mêmes difficultés. La bonne nouvelle, c’est qu’il est possible de sortir de ce cercle vicieux. Voici quelques pistes pour amorcer ce changement :

 

1. S’autoriser à demander de l’aide

C’est souvent la partie la plus difficile, mais aussi la plus cruciale. Solliciter du soutien, que ce soit auprès de votre conjoint, d’une amie ou d’un professionnel, n’est pas un échec. Au contraire, c’est un acte de courage.

Commencez par déléguer de petites tâches. Vous serez peut-être surprise – et soulagée – de constater que tout ne repose pas sur vous.

Il est également essentiel de discuter de vos ressentis avec vos proches. Bien souvent, ils ne réalisent pas l’étendue de votre fatigue si vous ne leur en parlez pas.

 

2. Revoir ses priorités

Posez-vous cette question : « Qu’est-ce qui est vraiment essentiel ? » Souvent, nous nous surchargeons avec des tâches ou des attentes qui ne sont pas réellement indispensables ou qui ne sont pas les nôtres.

  • Parce qu’on veut faire plaisir.

  • Parce qu’on l’a toujours fait.

  • Parce qu’on pense que ça prendra moins de temps si on le fait nous-même.

Apprendre à dire « non » est un premier pas vers un meilleur équilibre. Dire « non » aux autres, c’est aussi dire « oui » à soi-même. Évidemment, ce n’est pas facile quand on a pris l’habitude de dire « oui » à chaque demande, presque par réflexe. Cela peut nécessiter un travail sur soi, parfois avec un accompagnement adapté, mais c’est possible.

 

3. Se créer des instants rien que pour soi

Prenez le temps de revenir à vous, même quelques minutes par jour. Voici quelques idées :

  • Profiter de la douche pour sentir l’eau couler sur votre peau.

  • Lire quelques pages d’un livre avant de dormir.

  • Chanter dans la voiture sur le trajet du travail.

Ces petits moments ne sont pas un luxe : ils sont une nécessité.

 

4. Renouer avec la joie et la créativité

Quand avez-vous pris le temps de faire quelque chose qui vous rend vraiment heureuse ? Redécouvrez une activité créative ou un hobby que vous avez laissé de côté. Ces moments de plaisir sont important et aident à retrouver la joie de vivre et l’envie.

Les bienfaits d’un équilibre retrouvé

En prenant soin de vous, vous n’êtes pas égoïste. Vous montrez à vos enfants et à votre entourage l’importance de respecter ses propres besoins. Vous devenez un modèle pour eux, et cela leur sera bénéfique à long terme.

Retrouver un équilibre, c’est aussi améliorer votre moral, retrouver de la joie, de la légèreté et l’envie de vivre pleinement. La vie devient plus agréable, plus fluide, plus facile.

Vos relations s’enrichissent également : une personne épanouie est plus disponible émotionnellement pour ses proches. Elle est capable d’écouter, de partager, sans ressentir ce poids constant sur ses épaules.

Et si vous faisiez le premier pas ?

Se remettre au centre de sa propre vie demande du courage, mais c’est un acte profondément libérateur. Vous méritez autant d’attention et de soin que ceux que vous prodiguez aux autres.

Aujourd’hui, faites un premier pas. Prenez une feuille et écrivez trois actions que vous pourriez faire dès maintenant pour vous sentir mieux. Peut-être une sieste, un appel à une amie ou une promenade en plein air. La taille de l’action peut être petite ou grande, l’essentiel est de commencer.

 

Alors, par quoi commencez-vous pour reprendre soin de vous et retrouver équilibre et sérénité ?

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.